PRÉCIEUX Eustache Jean
° Richelieu (37), 18 XII 1752 ; † Auxerre, 25 V 1798.
- f. d'Eustache & Jeanne Drouin.
- Moine bénédictin à Auxerre, il doit quitter son couvent au début de la Révolution, en application d'une loi votée le 13 II 1790 à l'Assemblée nationale constituante (cette loi dissout les ordres contemplatifs en France et interdit tout vœu monastique). Après l'invalidation, le 16 IV 1791, du curé de Lindry, accusé d'avoir émis diverses restrictions en prêtant le serment* requis, il est nommé curé à sa place, le 15 V 1791 [AD Yonne, L 686]. Il doit cependant affronter le curé invalidé, Claude Goin, qui refuse obstinément de quitter le presbytère. L'effervescence est telle, à Lindry, que le directoire du district d'Auxerre doit intervenir pour mettre un terme au désordre, en adressant une convocation au prêtre récalcitrant, le 4 VII 1791 [AD Yonne, L 776]. Le 13 XI 1791, la veille du jour prévu pour l'élection d'un nouveau maire à Lindry, Précieux se voit élu président de l'assemblée électorale. C'est donc sous son égide que tous les citoyens actifs de la commune viennent voter à l'église, le 14 XI 1791. Le maire sortant, Edme Bougault, ayant été réélu par 55 voix sur 107 suffrages exprimés, l'un de ses adversaires malheureux, le notaire Jean Antoine Alexandre Bachelet*, conteste aussitôt la procédure. Réunissant chez lui une assemblée particulière de 51 opposants, il rédige une pétition par laquelle il réclame l'annulation du vote pour vice de forme : il reproche à Précieux d'avoir été élu président de l'assemblée électorale par acclamation, et non pas au scrutin à la pluralité simple des suffrages, comme l'exige pourtant l'article 10 de la loi du 14 XII 1789. Le nouveau curé a beau déclarer que la pétition est illicite et que seule l'assemblée électorale qu'il vient de présider est légale, le notaire obtient gain de cause : l'article 62 de la loi du 14 XII 1789 autorise en effet les citoyens à rédiger des pétitions au sein d'assemblées particulières. L'élection municipale de Lindry est donc annulée le 21 XI 1791 par le directoire du district d'Auxerre, qui donne ainsi tort au nouveau curé [AD Yonne, L 758, acte 372]. A la suite de cette décision, un deuxième scrutin est organisé en l'église paroissiale, le 5 XII 1791. Ceci donne lieu à des violences d'une telle ampleur, entre les deux factions rivales, que le directoire du département de l'Yonne doit intervenir à son tour, ordonnant la dissolution de l'assemblée électorale de Lindry [AD Yonne, L 37]. Dans la foulée, le 13 XII 1791, le directoire du district d'Auxerre décide d'envoyer deux commissaires sur place, lors d'une troisième et dernière assemblée de citoyens, jugeant que «la division qui règne depuis longtemps entre les habitants de la commune de Lindry ne permet pas de penser qu'ils puissent parvenir à l'élection de leurs officiers municipaux, à moins qu'il n'y ait quelqu'un qui assiste à leur assemblée pour y maintenir l'ordre» [AD Yonne, L 757, acte 296]. Cette mesure de précaution est approuvée par le directoire du département le 15 XII 1791 [AD Yonne, L 37]. C'est donc en présence de deux commissaires auxerrois que se tient le troisième scrutin, le 27 XII 1791, au cours duquel est élu un nouveau maire en la personne de Claude Jolly, ceci par 80 voix sur 148 suffrages exprimés [AD Yonne, L 186]. De son côté, Précieux devient conseiller municipal. Il doit céder à la commune les diverses propriétés de la cure, qui sont vendues le 20 IV 1792 comme biens nationaux. Puis, le 4 XI 1792, il doit remettre au nouveau maire de Lindry tous les registres paroissiaux, en accord avec le décret du 20 IX 1792 qui ordonne le transfert de l'enregistrement des naissances, mariages et décès aux municipalités. C'est lui qui continue toutefois à tenir les registres, puisqu'il est élu officier d'état civil peu de temps après le transfert, ceci le 9 XII 1792 [AD Yonne, 4E 229, D1]. Contraint par les événements, la Révolution étant devenue anticléricale, il finit par remettre ses lettres de prêtrise au directoire du district d'Auxerre, le 11 II 1794 [AD Yonne, L 754]. Puis, un mois plus tard, à l'âge de 41 ans, il convole en justes noces avec sa jeune concubine, âgée de 22 ans et enceinte de trois mois [AD Yonne, 4E 229, E9]. Il reste à Lindry encore quelques semaines, assumant sa fonction d'officier d'état civil jusqu'au 9 IV 1794, puis il part s'établir avec sa femme à Auxerre, où il devient «propriétaire», domicilié dans une maison de la place de la Nouvelle-Halle (actuelle place des Cordeliers). Pendant quatre ans, jusqu'à sa mort, il travaillera comme employé au bureau du payeur général. x (Lindry, 6 III 1794) Anne Bailly, fille de Jean & Anne Chevrier ; ° Auxerre, 18 XI 1771. D'où trois enfants :
1. Eustache, ° Auxerre, 28 IX 1794.
2. Anne, ° Auxerre, 20 IV 1796 ; † Auxerre, 6 IV 1798.
3.Camille (garçon), ° Auxerre, 21 III 1798.
Pierre Le Clercq
[AD Yonne : 4E 229, série L]